NULLE EN GEOGRAPHIE
Il y a ceux qui voyagent depuis toujours, ceux qui ont voyagé et pensent avoir tout vu, ceux qui ont attendu la retraite pour pouvoir voyager. Il y a mes chouchous, ceux qui considèrent que d’avoir sillonné la France en camping-car constitue en soi un tour du monde. Un vrai bonheur !
Il y a ceux qui regardent de loin, qui restent là et observent, ou pas.
J’aurais dû me douter dès l’école primaire que je ferais partie de ceux-là. Je ne comprenais pas l’intérêt d’apprendre la géographie. Je comprenais encore moins pourquoi on me parlait continent, ressource naturelle, densité de population, ou pire encore, pression atmosphérique, isobare et autres barbaries du même genre. A quoi pourrait bien me servir de connaitre les couches de l’écorce terrestre ? Quant à l’emplacement des planètes, la nature des étoiles ou la température du soleil, franchement… A quoi ça pourrait bien me servir ? Si ce n’est, à rien. Oui, autant le dire directement, j’étais nulle en géographie.
Oh ! j’ai appris les leçons, j’étais plutôt une bonne élève donc j’ai sauvé les meubles. J’ai fait mes devoirs à la maison, j’ai recraché les définitions lors des devoirs sur table. Probablement que j’ai dû rester dans la moyenne basse. Il faut croire que ça a suffi.
On paie cher les lacunes qu’on ne cherche pas à combler. Ne parlons ici que de géographie. Mais ce qui me rassure, c’est qu’en cas de trou noir pour écrire d’autres articles, j’en ai toute une palanquée de lacunes à exploiter.
L’école permet d’apprendre les rudiments du savoir, de s’ouvrir à la culture. Elle permet de développer ses capacités intellectuelles en formatant un cerveau, en lui ouvrant les portes de la compréhension. Ça s’appelle l’intelligence. Peu importe le niveau, ou plutôt non, il est important que chacun trouve son niveau et finisse par le dépasser.
A l’âge adulte, j’ai fini par mesurer les conséquences de mon ignorance. Elles sont à la mesure de ma frustration, quand je voudrais comprendre tel ou tel phénomène mais que pour cela, il faudrait que je reprenne la leçon, là où elle s’est arrêtée, et tenter de puiser dans les méandres de souvenirs oubliés depuis longtemps. Je n’ai pas la patience et mon ignorance reste maîtresse en son royaume.
Ma compensation intellectuelle serait l’intérêt que je porte aux gens. Une autre façon d’appréhender le monde, un voyage dans les mystères humains, des parcours de vie inattendus, même improbables. Oui, ça compense un peu pour tout ce que je ne connais pas !
Cette nuit, j’ai pris un cours de géographie. Hier, ma fille s’est envolée pour Pékin, une escale de quelques jours, Muraille de Chine oblige, puis un arrêt à Hong Kong, avant la destination finale, Bali. Je vais finir par m’améliorer. Rien que d’écrire cela me donne l’impression d’être une véritable initiée. Ça me fait plutôt rire.
Je ne vous cache pas que lorsque je sais qu’une de mes filles est dans un avion, je me dis que je la préférerais sur la terre ferme. Je suis toutefois très heureuse et très fière que ma progéniture soit férue de voyage et d’inconnu. Vous le comprenez, ça ne vient pas de moi, il faudra en référer à leur part paternelle.
FlightAware et Google Maps ! De dimanche à lundi 2 heures du matin, je la suis de loin. C’est comme ça que je plonge en géographie. Depuis cette nuit, je sais indiquer sur une carte, la Mer Noire, la Géorgie, l’Azerbaïdjan, le Turkménistan, l’Ouzbékistan, le Kazakhstan. Vers 23h20, heure française, franchissement de la frontière chinoise, survol de la Mongolie, pour une arrivée à Pékin vers 2 heures du matin.
Dommage que je ne retienne jamais ce genre d’information, vous voyez, le formatage du cerveau ne s’est pas fait comme il fallait, quand il fallait…et plus le temps passe… Je ne cherche plus à retenir. Je suis cependant très contente de l’avoir su, ne serait-ce qu’une journée ! Un pur moment de plaisir intellectuel, une délectation culturelle.
Ce que j’ai finalement envie de dire ici, c’est qu’il faut se battre, nous, parents ou grands-parents, pour que nos enfants, nos petits-enfants aient accès à leur propre liberté de penser, à leur capacité pleine et entière de réflexion. Il faut les aider à formater leur cerveau, oui, comme on formate un ordinateur pour qu’il puisse fonctionner et gérer toutes les données. Je ne parle pas d’inculquer des idées, des principes, ça c’est un autre sujet. Je parle de les accompagner sur le chemin de leur intelligence, car c’est leur capacité de compréhension et d’analyse et leur force de proposition qui feront toute la différence dans leur vie d’enfants devenus adultes.
Au-delà de l’école et des professeurs, c’est notre rôle de parents ou grands-parents d’expliquer à nos enfants à quoi vont leur servir dans leur vie future la géographie, la géométrie, les langues étrangères, les maths, le français, le sport, le dessin, tout quoi. L’école et la vie sont liées, on le sait bien pourtant, alors disons-le ! Répétons-le ! Au lieu de leur faire croire que ce sont les résultats et les notes qui comptent. L’enjeu va bien au-delà.
C’est de l’intelligence humaine appliquée dont on parle ici. Alors arrêtons de geindre sur l’Intelligence Artificielle ! Et exploitons toutes nos capacités, nos potentiels, nos pouvoirs humains.
Ma conclusion personnelle est que finalement, je ferai peut-être partie de ceux et celles qui … attendent la retraite pour voyager. Encore une de mes idées préconçues qui explose en plein vol ! Qui sait ! Sinon il me restera toujours le camping-car…
Ceci étant, je me dis que c’est un comble quand on a la prétention de vouloir publier une saga qui s’implante en Afrique, de Kinshasa à Johannesburg, passe par l’Amérique du Sud et pose quelques bagages aux Etats-Unis. Oui, c’est ça ! Un comble !
Versailles, Lundi 18 septembre 2023